Christopher Dembik, Senior Investment Strategy Adviser Pictet Asset Management.
La semaine dernière, le taux à 40 ans japonais a atteint 3,46% – un point haut de 20 ans. Cela s’est produit alors que les taux longs montent dans tous les pays développés. Le taux à 30 ans britannique a atteint 5,50% tandis que le taux à 30 ans américain a flirté avec 5%. Beaucoup d’analystes ont vu dans la flambée des taux japonais le signe de la perte de contrôle de la Banque du Japon (BoJ) et d’inquiétudes concernant la trajectoire de la dette japonaise. C’est faux, pour quatre raisons :
1/ La BoJ a abandonné le contrôle strict de la courbe des taux l’an dernier. Elle continue d’intervenir sur le marché obligataire, mais avec flexibilité. Si elle le souhaite, elle peut de nouveau introduire un contrôle de la courbe.
2/ Selon les dernières données de l’OCDE, la dette japonaise est soutenable. Les intérêts payés sur la dette n’ont représenté que 0,23% du PIB à la fin du premier trimestre. C’est négligeable.
3/ Un pays endetté a besoin d’une inflation élevée. C’est le cas au Japon où elle est proche de son point haut depuis 30 ans.
4/ Argument imparable, la BoJ détient 46% du stock total d’obligations souveraines du pays. L’archipel est le parfait exemple de dominance fiscale.
En revanche, la hausse des taux longs dans les autres pays pose davantage un problème. C’est particulièrement le cas aux États-Unis. Nous sommes loin de la zone de danger située entre 4,75%-5,00% sur le taux à 10 ans. Mais nous nous en rapprochons, ce qui provoque une contagion à l’ensemble du marché obligataire. Sans surprise, la France, lourdement endettée et étant confrontée à une croissance atone (0,6% en 2025 selon la dernière estimation de la Commission Européenne), n’est pas épargnée. Le taux de référence se situe à une trentaine de points de base supérieurs à son niveau de fin 2024. Nous estimons que la baisse des taux attendue par la BCE en juin (-25 points de base) et même au-delà ne va pas permettre une diminution des tensions sur l’obligataire souverain européen.
À surveiller :
- Les tensions qui persistent sur le marché obligataire.
- Nvidia est en train d’investir dans l’informatique quantique via la start-up californienne PsiQuantum qui fabrique des ordinateurs quantiques avec des photons. Ce sera peut-être la prochaine vague après l’IA…ou une bulle. Le géant américain, qui se présente désormais comme un fournisseur d’infrastructures en IA et en robotique, publie également ses résultats financiers pour le premier trimestre le 28 mai. Ils devraient être bons. Il faudra surveiller s’il y a du changement au niveau de la répartition géographique des acheteurs de processeurs Nvidia du fait de la guerre commerciale. La Chine, Taïwan et Singapour occupent une place de choix alors que l’Europe est tout simplement invisible.
- Le PIB français au premier trimestre, qui devrait être décevant. La conjoncture est défavorable, marquée par une contraction des dépenses en capital des entreprises en France depuis la mi-2023, après un fort rebond post-Covid.
Vous ne l’avez pas lu dans la presse
Pour la première fois en 25 ans, les Britanniques détiennent plus de bons du Trésor américain que les Chinois. C’est une bonne nouvelle pour la Maison Blanche. On voit mal les Britanniques – fidèles alliés des Américains – se délester rapidement de leurs actifs en dollars.